La Loi sur l’interdiction de subventions municipales2, le législateur a tout de même adopté au fil des ans de nombreuses exceptions à cette interdiction..
Tous les intervenants du monde municipal connaissent bien le principe de base interdisant aux municipalités de venir en aide à tout établissement industriel ou commercial situé sur son territoire, sauf exception.
Bien que cette interdiction soit prévue dans une loi d’ordre public, soit la Loi sur l’interdiction de subventions municipales2, le législateur a tout de même adopté au fil des ans de nombreuses exceptions à cette interdiction. C’est notamment le cas avec la Loi sur les compétences municipales (LCM)3 qui, depuis 2006, confère des pouvoirs en matière de développement économique qui permettent aux municipalités:
Dans le présent article, nous nous concentrerons sur ce troisième pouvoir, soit celui d’accorder des crédits de taxes prévus aux articles 92.1 et suivants LCM. Pour assurer une certaine coordination, l’article 92.6 prévoit que le programme doit s’inscrire dans le plan de développement économique de la Municipalité, ou si elle n’a pas de tel plan, tenir compte de toute mesure prise par la MRC en la matière. Le principal intérêt d’adopter un tel programme de crédit de taxes réside dans le fait qu’il s’agit d’un avantage qu’une municipalité peut consentir à cout nul, contrairement aux deux premiers pouvoirs qui impliquent le versement d’une somme d’argent par la Municipalité. À cet effet, mentionnons que le principe interdisant à une municipalité de faire remise de ses taxes demeure5 et qu’un crédit de taxes municipales n’est possible que s’il existe une disposition législative claire à cet effet, tel l’article 92.1 LCM.
Le but principal visé par la plupart des programmes de crédit de taxes adoptés par les municipalités est de stimuler l’investissement des entreprises et le développement économique en prévoyant compenser toute augmentation des taxes applicables à la suite de la réalisation de travaux de construction ou de modification d’un immeuble6. Ces travaux doivent être effectués par une entreprise du secteur privé qui est le propriétaire ou l’occupant d’un immeuble qui fait partie d’une unité d’évaluation répertoriée sous l’un des secteurs économiques visés. Si le crédit de taxes est demandé
par un occupant, tel un locataire, plutôt que par le propriétaire, mentionnons que la notion d’occupant est limitée par
l’article 92.2 LCM aux seuls occupants d’un immeuble appartenant à la Municipalité et qui a été acquis en vertu de la Loi sur les immeubles industriels municipaux.
Le seul effet du crédit de taxes sur le budget de la Municipalité est donc de la priver de manière partielle ou totale et pendant un certain temps des revenus additionnels qui seraient générés par l’augmentation de taxes à la suite des travaux admissibles.
Mentionnons toutefois que ce ne sont pas toutes les entreprises industrielles et commerciales qui peuvent bénéficier du programme de crédit de taxes, mais seulement celles des secteurs d’activité économique prévues au règlement du gouvernement adopté
à cet effet7. Les secteurs économiques visés sont identifiés
à l’aide du code d’utilisation des biens-fonds (CUBF). Le règlement ne mentionne qu’une trentaine de rubriques ; parmi celles-ci on retrouve les sections 2 et 3 de la classification qui visent l’ensemble de toutes les activités manufacturières imaginables dont la nomenclature est comprise dans des dizaines, voire des centaines de sous-sections. Comme le code d’activité économique CUBF
fait partie des mentions obligatoires devant apparaitre au rôle d’évaluation, il est donc facile pour la Municipalité de déterminer si les travaux sont admissibles ou non au programme.
Parmi les autres exigences, mentionnons que le règlement doit prévoir la valeur totale de l’aide qui peut être accordée et pourrait devoir, dans certains cas, faire l’objet d’une approbation par les personnes habiles à voter si l’aide excède un certain montant ou un certain pourcentage du budget municipal prévu à la loi. Aussi, la période pendant laquelle une aide peut être accordée à une personne déclarée admissible ne peut excéder dix ans. La plupart
des programmes existant actuellement prévoient un crédit de taxes dégressif au fil du temps ; partant généralement d’un crédit de 100 % de l’augmentation des taxes résultant des travaux pour la ou les premières années, pour s’estomper plus ou moins rapidement et prendre fin dans un délai maximal de dix ans8.
Le programme peut prévoir toute modalité ou condition relative aux travaux admissibles, telle une bonification du pourcentage du crédit de taxes selon que la nouvelle construction bénéficie d’une certification environnementale, LEED ou autre9.
Mentionnons en terminant que la loi prévoit que le crédit de taxes ne pourra pas être accordé dans le cas où le propriétaire ou l’occupant bénéficie déjà d’une aide gouvernementale destinée à réduire les taxes foncières. Finalement, tout comme les deux autres pouvoirs d’aide mentionnés plus tôt, soit l’aide à une entreprise du secteur privé d’un maximum de 250 000 $ et l’aide à la relocalisation, le crédit de taxes ne pourra non plus être accordé si on transfère des activités qui étaient auparavant exercées sur le territoire d’une autre municipalité locale.
On comprend bien ici l’intention claire du législateur d’éviter que les municipalités ne se livrent à une surenchère pour attirer les entreprises sur leur territoire.